Montagnac : hôtel de Brignac

Brignac_salle_poutre2_faceA_09 - copie 2« La chasse, comme on le sait, c’est l’image de la guerre » Cette citation éclaire toute la lecture du plafond de l’hôtel de Brignac. Négliger cet aspect c’est commettre une faute qui débouche sur le déni du message consigné sur ces poutres centenaires.

Classement au titre des Monuments historiques le 2/02/1988

Adresse et possibilité de visite :

L’hôtel de Brignac est une propriété privée et habitée.
Les nouveaux propriétaires prévoient d’ouvrir ponctuellement au public, afin de faire découvrir leur plafond. Nous vous tiendrons informés de ces possibilités.

Contexte

Le plafond peint de l’hôtel de Brignac se situe dans la cité médiévale de Montagnac. Proche de Pézenas, cette ville de l’ancien diocèse d’Agde a su développer tout au long du Moyen Age un commerce fructueux autour de ses foires. Bénéficiant d’un privilège royal et d’un pont jeté sur le fleuve Hérault, cette cité languedocienne a attiré à elle marchands étrangers et fabricants locaux, notamment des drapiers. Ce monopole économique a fait la fortune de cette place et de ses habitants, ce qui s’est traduit dans le développement urbain par des demeures aristocratiques, objet de cette étude.

Brignac_salle_poutre1_faceA_06 - copieL’hôtel de Brignac se niche entre d’antiques murailles urbaines. Son porche d’entrée, ainsi que ses fenêtres à meneaux s’ouvrent sur l’actuelle rue de Lafayette, où se retrouvent de nombreuses demeures patriciennes. Cette demeure du XVe siècle rappelle la puissance des foires montagnacoises, dont Jacques Cœur est très proche. Constituée de deux étages, dont le dernier tronqué par l’abaissement de la toiture, elle comprend un escalier à vis extérieur qui s’ouvre sur une superposition de galeries ouvertes sur cour, plutôt uniques dans l’architecture vernaculaire de cette époque. A l’étage noble, deux plafonds peints gothiques narrent l’histoire de ses premiers propriétaires. Livré aux intempéries, celui de la galerie est malheureusement très abîmé. Pour notre plus grand bonheur, celui de la pièce d’apparat est magnifiquement conservé, et restauré depuis la fin 2010.

Description

Cet admirable plafond rural s’orne d’un décor de chasse, d’animaux fantastiques, de scènes courtoises et d’un ensemble héraldique d’une exceptionnelle richesse. Plus d’une cinquantaine de blasons trônent sur les poutres, respectant un protocole bien établi. Le roi et surtout le dauphin occupent la place d’honneur sur l’ancien manteau d’une cheminée disparue de nos jours. De chaque côté, les armoiries des grands personnages livrent une page de politique internationale en ce milieu du XVe siècle. A ce stade, ce plafond manifeste un engagement évident de la part de son présumé commanditaire, Paul de Brignac, en faveur du futur Louis IX et une critique voilée du roi, Charles VII. Les grands du royaume, comme les Armagnac, les Lévis ou encore le duc de Bretagne, mais aussi les princes de l’Eglise, Eugène IV, Guillaume de Montjoie ou Guilhem de Cenaret sont représentés au travers de leurs armoiries respectives. Enfin, les closoirs offrent tout un échantillon de blasons de seigneurs locaux, qui forment un puissant réseau d’alliance et de fidélité, nécessaire en cette fin de la guerre de Cent Ans.

Brignac_salle_poutre3_faceA_13 - copie 2Le décor cynégétique et le discours politique qui se reflètent sur ce plafond, notamment dans l’héraldique, ont pour unique objet de magnifier la famille de Brignac. Rappelons que le droit de chasse, réservé uniquement à la noblesse, n’est pas encore reconnu en terres languedociennes. Ainsi, tout en individualisant le commanditaire dans sa lignée, la chasse est le prélude et l’image de la guerre dont elle pratique les ruses et les stratagèmes, elle endurcit le corps au travail, et l’accoutume au danger. Cette démonstration poursuit le double but d’impressionner l’assistance et de démontrer à perpétuité la noblesse des hôtes, de leur ascendance et de leur descendance.

Philippe Huppé
février 2011

Classé au titre des Monuments Historiques en 1988 (aller sur la base Mérimée)

Bibliographie

-VERDIER (Th.), Architecture à Montagnac sous l’Ancien Régime, Editions de l’Esperou, 1997.

-DITTMAR (P-O) et SCHMITT (J-C), Le plafond peint est-il un espace marginal ? L’exemple de Capestang, in Plafonds peints médiévaux en Languedoc, Colloque de Capestang, Narbonne, Lagrasse (2008), pp. 67-98.

-HUPPÉ (Ph.), L’exemple d’une propagande politique : les blasons exceptionnels de l’Hôtel de Brignac, in Les Amis de Montagnac, 2011. (A paraître prochainement)

-HUPPÉ (Ph.), Les seigneurs de Clermont-Lodève. Du palais carolingien à la cour napolitaine, (IXe-XVe siècles), T. 1 et 2, Editions les Presses Littéraires.

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1 réponse

  1. rubio christian dit :

    ex proprietaire de l ‘hotel de brignac,je signale que le closoir,situe sur la cheminee à cote du dauphin est d’anjou car il est d’azur a trois fleurs de lys d’or (le roi) au lambel de gueules.et non d’argent, orlean,comme certain specaliste le decrivent.en effet etant l’inventeur du plafond, je connaissais les couleurs avant le decapage du plafond; apres le nettoyage je me suis fait confirmer l’email (de gueule, d’apres le specialiste mr j-l M .pour